Monday, September 18, 2006

Après sa visite sur les sites des déchets toxiques/ Laurent Gbagbo annonce : “Pas d’amnistie pour les coupables”


Le Temps - lundi 18 septembre 2006


A l'issue d'une visite à l'hôpital général d'Abobo, à Djibi village et Montézo, le Président Laurent Gbagbo, a tenu à faire des précisions.

Monsieur le Président, que retenir de la tournée que vous venez d'effectuer ?

J'ai visité l'hôpital général d'Abobo Gare parce que des collaborateurs avaient déjà visité les grands centres et des CHU. L'hôpital par rapport aux autres, est un centre plus modeste qui reçoit beaucoup de malades. Ensuite, je se suis allé à Djibi Village où il y eu un dépôt de déchets toxiques. J'ai été fier de trouver une équipe médicale très déterminée aux chevets de la population. Enfin, je suis allé à Montézo dans la sous-préfecture d'Alépé, pour présenter les condoléances de la République à la famille du Jeune Yapo Anges Battesti, décédé suite à l'inhalation des déchets toxiques. Je précise que j'irai dans toutes les familles de ceux qui sont décédés. Officiellement, on a signalé six. Ce à partir de mardi. Car, il est important que quand survient une telle catastrophe, que l'Etat ne reste pas aérien.

Excellence, l'on parle de 30 mille malades, c'est tout de même inquiétant ?

On parle de 42 mille. Il n'y a pas 42 mille malades. Mais 42 mille consultations. Il faut que les journalistes passent la bonne information. Parce que les mêmes malades viennent deux fois voire 4 fois selon leur état. En outre, il convient d'ajouter que la gratuité des soins attire la population. Mais, nous n'allons pas abandonner l'option de la gratuité. Ce que je peux vous dire, c'est que pour avoir, le nombre exact de malades, il faudra diviser le chiffre indiqué plus haut, au moins par trois. Nous avons six morts, c'est beaucoup mais nous n'avons que six morts. Je m'en réjouis et je voudrais profiter de l'occasion pour saluer le corps médical. Partout où je suis passé, je les ais trouvés vraiment efficaces, déterminés et débout. La semaine qui arrive la Présidence va les aider en leur donnant 50 millions pour l'achat des médicaments et de matériel médicaux. Surtout pour aider à trouver du matériel pour la respiration. Parce que parmi ceux qui sont morts certains l'ont été des suites de troubles respiratoires. C'est l'une des raisons pour laquelle j'interroge l'équipe qui m'entoure qui est composée de spécialistes. En outre, je suis allé voir sur place pour aider là où l'aide était nécessaire. Il faut aussi profiter de l'occasion pour corriger là où il y a des dysfonctionnements.

Monsieur le Président, peut-on avoir une idée de l'évolution de l'enquête en cours ?

J'ajoute un complément, j'ai saisi le procureur de la République pour ouvrir une enquête. Et quelques jours après, je me suis rendu compte que les déchets avaient été aussi versés dans des endroits qui n'étaient pas de son ressort. C'est pourquoi, j'ai saisi celui de Yopougon pour lui demander d'ouvrir une autre enquête Les enquêtes sont en cours, les personnes qui ont été appréhendées parlent mais c'est la justice et je ne suis pas encore autorisé à parler. N'oubliez pas que je suis Président du Conseil supérieur de la magistrature, en tant que tel, j'ai un droit de réserve. Je suis au courant. Mais sachez que les enquêtes auront deux aspects. Un aspect purement intérieur à la Côte d'Ivoire et l'autre va concerner l'extérieur. Parce que ces déchets-là n'ont pas été fabriqués ici. Ils ne proviennent pas des activités de notre industrie. C'est à partir d'ailleurs qu'on a décidé de venir les déverser ici. Pour ce qui nous concerne, sachez dès à présent que tous ceux qui seront concernés et condamnés n'auront aucune mesure de grâce de la part du Président de la République. Encore moins de loi d'amnistie les concernant. Celui qui sème la mort dans mon pays doit payer.

La crise armée a éclaté en septembre 2002 les déchets toxiques en septembre 2006. Envisagez-vous quelque chose pour exorciser le mal ?

Je ne suis ni imam ni prêtre, ni rabbin. Je ne peux donc prétendre être exorciste. C'est à nous de nous construire. Tout cela veut dire que bientôt nous allons sortir de cette passe avec le cœur rempli de joie, en conjuguant tous ces malheurs au passé. J'y crois fortement et de plus en plus.

Abidjan est très sale, la décharge d'Akouédo est débordée, à quand le démarrage des travaux de la nouvelle décharge ?

C'est une très belle question. Car ce matin, à Abobo devant l'hôpital, j'ai vu non seulement des ordures entassées mais les caniveaux étaient remplis d'eaux stagnantes. Tout cela montre que si nous voulons que la population soit en bonne santé, il nous faut vivre dans un environnement sain. Jusqu'à présent, quand on parle de déchets dangereux on pense aux déchets nucléaires ou toxiques comme ceux que nous avons à traiter en ce moment. Mais il n'y a pas que ça qui sème la maladie. Les déchets ordinaires que nous voyons partout à Abidjan sèment aussi la maladie. Quand je suis arrivé au pouvoir en 2000, quelques temps après, nous avons dû faire face aux conséquences de ces déchets-là. Pour deux semaines, nous avons du dépenser plus de deux milliards pour soigner les gens. Akouédo est saturé, il faut les comprendre. Ce qu'il nous faut aujourd'hui, c'est de traiter ces sites-là. J'ai passé une journée à Akouédo où j'ai décidé de manger avec eux, dans la maison climatisée d'un cadre. Malgré cela et les fenêtres fermées il y avait des mouches à l'intérieur et de la puanteur. Le jour où nous trouverons une solution à ces problèmes, nous nous débarrasserons de 60% des maladies que nous avons. Pour le moment, nous allons nous atteler à enlever les déchets toxiques d'abord, pour les garder dans un coin en attendant que la justice condamne celui qui nous les a amenés à venir les chercher. Pour la suite, nous allons dans les semaines à venir, enlever les ordures et les amener n'importe où. Mais pas chez les pauvres villageois d'Akouédo. Vous savez que l'Etat a deux sites à Akouédo : il y a deux casernes et les militaires sont malades, les populations aussi. Vous avez bien fait de soulever la question, elle nous tracasse et il faut trouver une solution.

Dans le cadre de l'enquête, certaines personnalités ont été suspendues dont la nomination dépend de votre signature. La forme a-t-elle été respectée ?

Je ne voudrais pas répondre à cette question et je ne voudrais pas faire de la politique. Aujourd'hui, je suis là pour réconforter et apporter assistance à ceux de nos compatriotes qui sont en détresse. Le reste n'est pas pressé. Il faudra désormais vous habituer à cette cellule qui m'entoure. Nous sommes en train de former autour du Président de la République, une équipe d'experts qui sont pour le moment spécialisés dans les questions de santé. Mais pour toutes les catastrophes qui vont advenir, ils seront en contact avec le ministère de la Santé et de l'Environnement pour mieux informer le Président de la République. Au niveau du gouvernement même, la direction de la Protection civile qui était au ministère de la Défense devient un Secrétariat d'Etat auprès du Premier ministre chargée de la Protection Civile et du Citoyen. Nous pensons qu'en responsabilisant ainsi, ça va être mieux.

Propos recueillis par Bamba Mafoumgbé

bamaf2000@yahoo.fr

Friday, September 15, 2006


Le Nouveau Réveil - N°1426 - samedi 16 septembre 2006

Anaky molesté hier par des manifestants à la Riviera : Le film d`un assassinat évité de justesse
samedi 16 septembre 2006

Il est 7h 10, hier à quelques mètres du corridor des Forces de défense et de sécurité (FDS) de la Riviéra Palmeraie. Des manifestants anti-déchets toxiques y ont dressé un barrage pour protester contre l`aggravation de l`odeur dans ce quartier. Une 4X4 Nissan arrive à cet endroit. A bord, se trouve Innocent Anaky Kobena ministre des Transports et président du Mouvement des Forces d`avenir (MFA, parti de l`opposition politique). C`est lui-même qui tient le volant. Sur le siège d`à côté, se trouve son aide de camp le Mdl N`guessan. A l`arrière, ont pris place son épouse Marie Yvonne et son benjamin, un enfant de cinq (5) ans. Il venait de Génie 2000 où il réside et se rendait à Ivosep pour la levée du corps de son frère Charlemagne Anaky Koffi, décédé le 28 août dernier.A la vue des manifestants, l`aide de camp en tenue de gendarme descend et tente de persuader les manifestants de laisser passer le véhicule. C`est à ce moment qu`un manifestant crie "c`est Anaky !". Tout se passe dès lors très vite. Le véhicule est pris d`assaut, les vitres sont brisées et le ministre prend la ferme résolution de descendre. Un groupe de manifestants se désolidarise et fait savoir qu`il faut le laisser partir, en avançant qu`il n`est pas responsable de leurs malheurs. Un autre groupe soutient le contraire. C`est ce groupe qui le contraint à prendre le chemin de la décharge d`Akouédo "pour qu`il aille respirer l`odeur, comme ça on va tous mourir", font savoir des manifestants. Entouré d`une foule surexcitée parmi laquelle des gens qui clament ouvertement qu`il faut en finir ou qui proposent qu`on "les braise", Innocent Anaky Kobéna, son épouse et son fils sont entraînés jusqu`aux encablures du camp d`Akouédo, sur la route de la décharge. Pendant ce temps, des individus le harcèlent, lui tapent dessus, l`injurient. Pendant ce temps aussi, son aide de camp qui n`a pas fait usage de son arme alerte des camarades du bataillon blindé d`Akouédo. Le véhicule est braisé. Ce sont les militaires alertés qui viennent arracher la famille séquestrée des mains de leurs agresseurs. Ils forment un cordon autour de lui tandis que des manifestants continuent de menacer. Au camp militaire d`Akouédo, la famille est placée sous la protection du chef de corps. Alerté, le chef d`Etat major des armées le général de brigade Philippe Mangou, se rend au camp. Il s`entretient avec le ministre et fait appel à un hélicoptère. La famille Anaky et lui-même y prennent place. Direction, une clinique privée située sur le boulevard de Marseille. Il est un peu plus de 8h. Pour Joël N`Guessan, joint au téléphone peu après l`évènement "c`est une tentative d`assassinat". Le général Magou s`est rendu en personne sur les lieux à Akouédo pour prendre avec lui le ministre Anaky à bord d`un hélicoptère. Dans l`aéronef, le général est joint par Mme Simone Gbagbo qui lui demandait si le Ministre Anaky allait bien. Jusqu’à tard dans la nuit d’hier, ni le chef de l’Etat, ni le 1er ministre ne sont enquéris de l’état de santé du ministre Anaky Kobena.André Silver Konankandresilver@yahoo.fr
Le Nouveau Réveil - N°1426 - samedi 16 septembre 2006

Anaky molesté hier par des manifestants à la Riviera : Le film d`un assassinat évité de justesse
samedi 16 septembre 2006

Il est 7h 10, hier à quelques mètres du corridor des Forces de défense et de sécurité (FDS) de la Riviéra Palmeraie. Des manifestants anti-déchets toxiques y ont dressé un barrage pour protester contre l`aggravation de l`odeur dans ce quartier. Une 4X4 Nissan arrive à cet endroit. A bord, se trouve Innocent Anaky Kobena ministre des Transports et président du Mouvement des Forces d`avenir (MFA, parti de l`opposition politique). C`est lui-même qui tient le volant. Sur le siège d`à côté, se trouve son aide de camp le Mdl N`guessan. A l`arrière, ont pris place son épouse Marie Yvonne et son benjamin, un enfant de cinq (5) ans. Il venait de Génie 2000 où il réside et se rendait à Ivosep pour la levée du corps de son frère Charlemagne Anaky Koffi, décédé le 28 août dernier.A la vue des manifestants, l`aide de camp en tenue de gendarme descend et tente de persuader les manifestants de laisser passer le véhicule. C`est à ce moment qu`un manifestant crie "c`est Anaky !". Tout se passe dès lors très vite. Le véhicule est pris d`assaut, les vitres sont brisées et le ministre prend la ferme résolution de descendre. Un groupe de manifestants se désolidarise et fait savoir qu`il faut le laisser partir, en avançant qu`il n`est pas responsable de leurs malheurs. Un autre groupe soutient le contraire. C`est ce groupe qui le contraint à prendre le chemin de la décharge d`Akouédo "pour qu`il aille respirer l`odeur, comme ça on va tous mourir", font savoir des manifestants. Entouré d`une foule surexcitée parmi laquelle des gens qui clament ouvertement qu`il faut en finir ou qui proposent qu`on "les braise", Innocent Anaky Kobéna, son épouse et son fils sont entraînés jusqu`aux encablures du camp d`Akouédo, sur la route de la décharge. Pendant ce temps, des individus le harcèlent, lui tapent dessus, l`injurient. Pendant ce temps aussi, son aide de camp qui n`a pas fait usage de son arme alerte des camarades du bataillon blindé d`Akouédo. Le véhicule est braisé. Ce sont les militaires alertés qui viennent arracher la famille séquestrée des mains de leurs agresseurs. Ils forment un cordon autour de lui tandis que des manifestants continuent de menacer. Au camp militaire d`Akouédo, la famille est placée sous la protection du chef de corps. Alerté, le chef d`Etat major des armées le général de brigade Philippe Mangou, se rend au camp. Il s`entretient avec le ministre et fait appel à un hélicoptère. La famille Anaky et lui-même y prennent place. Direction, une clinique privée située sur le boulevard de Marseille. Il est un peu plus de 8h. Pour Joël N`Guessan, joint au téléphone peu après l`évènement "c`est une tentative d`assassinat". Le général Magou s`est rendu en personne sur les lieux à Akouédo pour prendre avec lui le ministre Anaky à bord d`un hélicoptère. Dans l`aéronef, le général est joint par Mme Simone Gbagbo qui lui demandait si le Ministre Anaky allait bien. Jusqu’à tard dans la nuit d’hier, ni le chef de l’Etat, ni le 1er ministre ne sont enquéris de l’état de santé du ministre Anaky Kobena.André Silver Konankandresilver@yahoo.fr

vendredi 15 septembre 2006, 17h33
Pollution à Abidjan: manifestation violente malgré des annonces du Premier ministre
Par David YOUANT et Emmanuel DUPARCQ

ABIDJAN (AFP) - Plusieurs centaines d'habitants d'Abidjan manifestaient vendredi leur colère face à la persistance des émanations de déchets toxiques dans la ville, agressant même un ministre, malgré les appels au calme et le prochain nettoyage annoncés la veille par le gouvernement.Entre 200 et 300 habitants du quartier d'Akouédo, situé dans la commune abidjanaise de Cococy, bloquaient dans la matinée la circulation sur l'un des axes routiers principaux d'Abidjan avec des barrages de pneus enflammés, de planches et de vieux régrigérateurs, a constaté un journaliste de l'AFP.
Ils ont également incendié et pillé le domicile, une luxueuse demeure de type européen, du directeur du Port autonome d'Abidjan, Marcel Gossio.
M. Gossio, qui n'était pas chez lui vendredi matin, fait partie des quatre responsables administratifs suspendus jeudi de leurs fonctions par le Premier ministre Charles Konan Banny en raison des "défaillances" qui ont conduit les autorités portuaires à autoriser le déversement des déchets.
Un peu plus tôt, des manifestants d'Akouédo avaient agressé le ministre ivoirien des Transports, Innocent Anaky Kobeman, qui passait au volant de sa voiture, ont indiqué des riverains et des sources militaires.
Les manifestants l'ont fait descendre de sa voiture, l'ont brutalisé et emmené de force sur une site de déversement des déchets toxiques "pour que lui aussi puisse respirer les émanations", selon ces sources. Le ministre a du être évacué par un hélicoptère l'armée, a précisé une source militaire.
Les habitants d'Akouédo étaient descendus dans la rue pour exprimer leur ras-le-bol après avoir senti de nouveau vendredi une forte odeur semblable à celle des émanations toxiques et nauséabondes des déchets toxiques.
Sur place, la rumeur, non confirmée, courrait que des déchets toxiques avaient de nouveau été déversés dans la nuit.
Ces émanations ont intoxiqués plusieurs milliers d'habitants de la capitale économique ivoirienne (qui en compte environ 4 millions), et provoqué la mort de sept personnes et l'hospitalisation de 23 autres, selon le dernier bilan officiel fourni jeudi. Au total, le ministère de la Santé a recensé jusqu'ici "plus de 26.000 consultations médicales" liées à des intoxications.
La veille au soir, le Premier ministre ivoirien Charles Konan Banny était solennellement apparu à la télévision nationale pour annoncer plusieurs mesures, notamment le nettoyage des sites pollués à partir de dimanche.
"Nous serons très bientôt débarrassés de ces produits dangereux", a-t-il promis, en précisant que l'opération a été confiée au groupe français Séché.
M. Banny s'est surtout attaché à rassurer ses compatriotes, qui se plaignent du manque d'information sur la nature et les conséquences de la pollution, en rappelant notamment que le produit toxique n'était "pas radioactif" et que le réseau d'eau potable n'a pas été atteint, avant d'annoncer plusieurs mesures pour "protéger la chaîne alimentaire" près des sites pollués.
Il n'a pas exclu que des déchets toxiques soient toujours en circulation, indiquant que la police avait immobilisé huit des dix camions identifiés jusqu'ici comme contenant encore des produits toxiques.
M. Banny a confirmé que huit personnes avaient été arrêtés et quatre responsables administratifs, dont M. Gossio, suspendus dans cette affaire.
Le président ivoirien Laurent Gbagbo a de son côté affirmé jeudi soir que les auteurs du déversement des déchets toxiques, responsables de la mort d'au moins sept personnes, sont "connus" et "payeront pour leur crime".
Les centaines de tonnes de déchets toxiques ont été déversés à l'air libre sur une dizaine de sites d'Abidjan dans la nuit du 19 au 20 août par une société ivoirienne, Tommy, qui les avait déchargé avec l'accord des autorités ivoirienne d'un navire grec, le Probo Koala.


vendredi 15 septembre 2006, 15h54

Déchets toxiques: des manifestants érigent des barrages à Abidjan

ABIDJAN (AP) - Plusieurs centaines de personnes s'élevant contre le déversement de déchets toxiques à Abidjan ont brûlé des pneus et dressé des barrages dans les rues de la capitale commerciale vendredi, arrêtant et passant à tabac l'ancien ministre des Transports, a annoncé un responsable de son parti.
Les déchets toxiques provenant du pétrolier "Probo Koala", déversés en toute illégalité dans plusieurs décharges à ciel ouvert d'Abidjan ont causé la mort d'au moins six personnes et en ont intoxiqué des centaines d'autres, déclenchant la colère populaire et un scandale politique.
Trois barrages ont été dressés sur la route menant à la décharge principale d'Abidjan, tenus par des jeunes respirant derrière des masques blancs, armés de gourdins pour certains d'entre eux.
Ayant reconnu l'ancien ministre des Transports Innocent Kobenan Anaky, démissionnaire la semaine dernière avec le reste du gouvernement à cause du scandale, ils l'ont extirpé de sa voiture avant de le frapper et de le blesser au visage, a expliqué Joël N'Guessan, vice-président du parti.
Cette attaque était le seul incident violent enregistré sur ces barrages, où la police est arrivée par la suite pour tenter de reprendre le contrôle de la situation.
"Les gens veulent respirer. Ils ont l'impression que personne ne fait rien, alors que c'est une catastrophe nationale", expliquait un manifestant d'une vingtaine d'années, disant s'appeler Major.
Selon les experts dépêchés par l'ONU, 14 sites de déversement sauvage de ces déchets toxiques ont été recensés dans Abidjan, sans que l'on sache si la totalité des sites ont été repérés. AP

Thursday, September 14, 2006

Effets mortels des déchets toxiques - L’Oms annonce une catastrophe humanitaire

Le Front - 9/14/2006 6:56:14 PM
Le représentant résidant de l’Organisation mondiale de la santé pour la Côte d’Ivoire (Oms), Komlan Siamévi et celui de l’Organisation des Nations Unies pour l’Enfance (Unicef), Youssouf Omar ont affirmé hier, jeudi, à Abidjan que la situation humanitaire provoquée par la pollution des déchets toxiques déversés dans plusieurs sites à Abidjan, demeure très sérieuse et préoccupante.En raison de l’affluence des intoxiqués dans les formations sanitaires de la capitale économique. « Aujourd’hui, on nous fait comprendre que la phase aiguë du problème est passée, mais pour nous, ce que j’appelle la racine du problème demeure. Et que les actions doivent continuer », a déclaré Ernest Komlan Siamévi, lors de la conférence de presse hebdomadaire de l’Onuci, tenue hier à son siège, à Abidjan. Parlant des actions déjà menées en faveur des intoxiqués et des victimes des déchets toxiques, le représentant résident a indiqué avoir eu plusieurs réunions avec le comité interministériel mis en place par le gouvernement ivoirien, ainsi que le comité scientifique. Komlan Siamévi et le représentant résident de l’Unicef accompagnés de l’adjoint de Pierre Schori, Abou Moussa ont visité également les centres hospitaliers et universitaires de Cocody, Yopougon, Treichville et le centre de santé communautaire d’Akouédo, où se situe la principale décharge de la ville d’Abidjan. Les personnalités onusiennes, selon le patron de l’Oms à Abidjan, ont pu se rendre compte de la gravité de l’intoxication. Après avoir pris note, l’Oms, l’Unicef et l’Onuci ont offert un lot de médicaments et de matériels médicaux d’une valeur de 50.000 dollars soit près de 25 millions de Fcfa. Par ailleurs, Komlan Siamévi a interpellé les autorités ivoiriennes sur la surveillance épidémiologique, malgré l’arrivée des experts français et onusiens à Abidjan face à l’ampleur et la gravité de la situation. Au terme des différentes visites effectuées dans les formations sanitaires et Chu de la capitale économique, le représentant résident de l’Oms a indiqué également que la situation est devenue aujourd’hui très sérieuse. « Nous avons été particulièrement au Chu de Cocody, Yopougon, Treichville et au centre de santé d’Akouédo. Je peux vous dire que la situation est sérieuse. Les déchets toxiques dans la ville ont provoqué une forte angoisse au sein de la population. Et ceci a désorganisé les services de santé’’. Pour étayer ses propos, Komlan Siamévi a indiqué que le Chu de Treichville reçoit par jour 1000 à 1800 personnes. Et mobilise à cet effet, 22 médecins le matin, 22 l’après-midi et 22 autres la nuit soit 66 médecins. Ajouter à cela, 6 pharmaciens, une centaine de paramédicaux. ‘’Rien que pour le Chu de Treichville !’’, a-t-il martelé. ‘’Même la salle de radiologie est devenue une salle de consultations pour les personnes affectées. Autrement tout l’hôpital a été mobilisé pour les déchets toxiques. Nous avons été à Akouédo, il n’y a qu’un seul médecin qui est une dame. Elle est complètement submergée’’. Au regard de ce tableau, sombre et macabre, le représentant résident de l’Oms a conclu que la situation est suffisamment grave.Déless Goué (dematong@yahoo.fr)
Trafigura, affréteur au rabais

La société, basée aux Pays-Bas, a choisi Abidjan pour faire des «économies».

Par Sabine CESSOU
http://www.liberation.fr/actualite/monde/204345.FR.php
QUOTIDIEN : Jeudi 14 septembre 2006 - 06:00
Amsterdam de notre correspondante


Les responsables de Trafigura tentent, depuis lundi, d'opposer une défense à ce qu'ils appellent des «rumeurs». Parce qu'elle a affrété le Probo Koala, cette société de négoce international basée à Amsterdam se retrouve au coeur de toutes les accusations. «Greenpeace nous reproche d'avoir laissé naviguer pendant des semaines un bateau fantôme chargé de poison», s'indigne Jan Maat, porte-parole de cette multinationale néerlandaise, spécialisée dans le négoce de pétrole et de métaux de base. Trafigura, 630 employés et 20 milliards d'euros de chiffre d'affaires annuel, affirme avoir pris une décision d'abord et avant tout «économique», en livrant 581 tonnes de déchets toxiques à Abidjan.

Soucieux de raconter la «vraie histoire» de cette cargaison, Jan Maat rappelle que tout a commencé le 2 juillet à Amsterdam. Le Probo Koala, un tanker battant pavillon panaméen et détenu par des armateurs grecs, a été loué par Trafigura pour transporter de l'essence. «A chaque livraison, les cales du tanker sont nettoyées, conformément aux réglementations internationales, raconte Jan Maat. Les eaux sales du nettoyage, qui contiennent de la soude caustique et des restes de pétrole, sont pompées dans une cuve spéciale à bord du navire, avant d'être transférées à quai à des sociétés spécialisées dans le traitement des déchets.»
«Terrible odeur.» Des analyses ayant révélé que les eaux sales du Probo Koala étaient très polluées, Amsterdam Port Services (APS), la société qui devait traiter celles-ci, a voulu renégocier son contrat à la hausse. «La forte teneur des déchets en soude caustique a d'ailleurs été remarquée par les employés du port d'Amsterdam eux-mêmes, gênés par une terrible odeur, reconnaît le porte-parole de Trafigura. Nous avons d'abord décidé d'en traiter la moitié à Amsterdam et la moitié à Rotterdam, mais les délais nous auraient fait perdre beaucoup d'argent, 35 000 dollars par jour de retard au port d'Amsterdam et 250 000 dollars de pénalités au port suivant. Nous avons alors repompé les déchets à bord du navire et cherché un autre port.»
Conformément à son itinéraire prévu, le Probo Koala s'est donc rendu le 9 juillet à Paldiski, en Estonie, pour charger une cargaison d'essence à destination de Lagos, au Nigeria. Le 19 août, de retour du Nigeria, le tanker fait escale, à Abidjan pour se débarrasser de ses eaux usées auprès du groupe Tommy, une société ivoirienne. «Tommy est une société certifiée», rappelle Jan Maat, qui insiste aussi sur le fait que Trafigura a bien informé par écrit les autorités de Côte-d'Ivoire de la nature toxique de ses eaux sales, «à manier avec précaution». Sur tout ce qui s'est passé après la vidange de ses déchets à Abidjan, le groupe néerlandais décline toute responsabilité et affirme qu' «il n'y a pas de lien entre Tommy et Puma Energy, [notre] filiale en Côte-d'Ivoire».
Au siège de Greenpeace à Amsterdam, on continue de dénoncer le «dumping» dans un pays pauvre de déchets toxiques trop chers à traiter en Europe. «Trafigura aurait dû savoir que les déchets n'allaient pas être traités de manière appropriée en Côte-d'Ivoire, dénonce Eco Matser, chargé de campagne à Greenpeace. Ce n'est pas très difficile de se rendre compte qu'il n'y a pas les mêmes normes à Amsterdam et Abidjan.» Une perception que conteste Trafigura. «Abidjan est considéré comme l'un des ports les plus importants et les mieux équipés d'Afrique de l'Ouest», rappelle la multinationale.
Le scandale menace de prendre un tour politique aux Pays-Bas. Diederik Samsom, un député travailliste du Parti pour le travail et le progrès (PVDA, opposition), demande en effet des comptes à Ben Bot, le ministre des Affaires étrangères, ainsi qu'à Pieter Van Geel, le secrétaire d'Etat à l'Environnement. «Nous aimerions savoir si les autorités ont tout fait pour empêcher ce cargo de quitter Amsterdam sans avoir traité ses déchets, déclare Diederik Samsom. En principe, nos lois sur la pollution des navires ne prévoient pas l'option la moins chère pour les armateurs, mais la plus responsable.»
Justice. Le parquet néerlandais, de son côté, a ouvert une enquête sur les conditions dans lesquelles les déchets ont pu être rechargés à bord du Probo Koala, en contravention avec les lois néerlandaises et les conventions européennes. Trafigura, qui n'en est pas à ses premiers déboires avec la justice, tente de limiter les dégâts de cette nouvelle affaire sur son image. Une autre enquête est en cours, aux Pays-Bas, sur les opérations du groupe de négoce dans le cadre du scandale provoqué par le programme des Nations unies «Pétrole contre nourriture» en Irak. Des cargaisons illégales de pétrole irakien, acheminées par plusieurs intermédiaires, parmi lesquels Trafigura, ont en effet servi à financer l'armement du régime de Saddam Hussein.
Pollution. Christian Bouquet, professeur de géographie, évoque le rôle du Président Gbagbo et de son entourage:


«Le port d'Abidjan est une pompe à finances pour le régime»

Par Judith RUEFF
QUOTIDIEN : Jeudi 14 septembre 2006 - 06:00


Christian Bouquet, professeur de géographie politique à Bordeaux-III et spécialiste de la Côte-d'Ivoire, explique comment le port d'Abidjan est au coeur de tous les trafics.
Sur le même sujet

Le port d'Abidjan est le poumon économique du pays. Une telle affaire est-elle possible à l'insu du pouvoir ivoirien ?
A l'évidence, le port autonome d'Abidjan est un très gros fromage, attribué par Gbagbo à un de ses proches, Marcel Gossio, l'un des plus gros sponsors du parti présidentiel. Gossio est partie prenante avec l'épouse du Président, Simone, dans la société écran ­ Tommy ­ qui était censée épandre les déchets dans des décharges d'Abidjan. Il est probable que l'on savait que ces produits étaient toxiques, même si le chef de l'Etat a toujours dit qu'on lui avait garanti le contraire.
A qui rapporte le crime ?
Je l'ignore dans ce cas précis, mais il est certain que le port, qui a toujours été une pompe à finances pour le régime, est en excellente santé. Depuis 2004, le trafic est supérieur à ce qu'il était avant la coupure du pays en deux, en 2002, avec un record en 2005 : 18,6 millions de tonnes. Le trafic des produits pétroliers se porte très bien, avec l'ouverture d'un nouveau champ de brut et la hausse des capacités de raffinage. Tout cela représente évidemment beaucoup d'argent : 1 000 milliards de francs CFA (environ 1,5 milliard d'euros) pour le pétrole, 815 milliards pour le café-cacao. Mais cette rente s'évapore, et bien peu atterrit dans les caisses de l'Etat. Cette année, les prévisions de recettes fiscales pétrolières devraient atteindre 80 milliards d'euros. On est loin du compte.

Le scandale éclabousse-t-il le Président ?

Je suis surpris du risque qui a été pris d'accepter ces déchets pour des sommes relativement modiques, si l'on en croit la presse ivoirienne. Quelques milliards de francs CFA, ce n'est rien au vu de l'argent détourné chaque jour. Il y a sans doute eu dérapage à des échelons intermédiaires...

Et Laurent Gbagbo, une fois de plus, a su transformer l'affaire en coup politique, en démissionnant en bloc le gouvernement du Premier ministre Charles Konan Banny. Ce qui va lui permettre une nouvelle fois de repousser les échéances, alors que l'ONU examine dans quelques jours la question du désarmement et de l'identification des électeurs, et que son mandat expire en principe fin octobre.
Pollution
Des déchets qui empoisonnent Abidjan

Tandis que l'épandage des résidus toxiques du «Probo Koala» en Côte-d'Ivoire se poursuit, le désastre sanitaire vire à l'affaire d'Etat.

Par Charles AMAZOHOUNE
Liberation
QUOTIDIEN : Jeudi 14 septembre 2006 - 06:00
Abidjan correspondance

Des milliers d'Abidjanais sont malades, au moins six personnes sont mortes, la Côte-d'Ivoire n'a plus de gouvernement, mais ça continue : chaque nuit, des camions déversent les déchets toxiques laissés par le Probo Koala aux quatre coins de la capitale économique. Et chaque matin, les habitants découvrent une nouvelle poubelle sauvage. Lundi, par exemple, dans le canal de Marcory, au sud de la ville. Et hier matin encore, dans un village à côté d'Alépé, au nord de l'agglomération. Ceux qui en ont les moyens quittent la ville. Depuis bientôt un mois, l'affaire pollue l'air de la lagune Ebrié et l'atmosphère politique, déjà tendue à l'approche de la fin de mandat du président Gbagbo, en octobre.
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Traitement. La chaîne de la télé ivoirienne TV2 a révélé l'affaire, début août,dans un reportage passé inaperçu (un banal phénomène de pollution dans une agglomération en proie à une insalubrité chronique). Depuis, c'est devenu une affaire d'Etat. Le 17 août, Trafigura, un affréteur néerlandais, entre en contact avec un consignataire ivoirien, la société Waibs, pour qu'il trouve, au port autonome d'Abidjan (PAA), une entreprise capable d'enlever les «slops» (eaux usées stockées dans les cales) du Probo Koala, un navire grec battant pavillon panaméen. L'affréteur prévient que ces déchets, constitués de résidus pétroliers, sont d'une grande toxicité et doivent être traités avant d'être déversés dans la nature.
La société Tommy, qui venait d'avoir trois semaines plus tôt son agrément d'installation comme spécialiste en vidange, entretien et soutage des navires, enlève curieusement le marché au nez et à la barbe de sa concurrente l'Industrie de technologie et d'énergie, détentrice jusque-là du monopole de ces opérations. Or, comme le précisera plus tard le directeur de la navigation, de la sécurité et de la garde côtière,Tommy n'est qu'un avitailleur qui n'avait ni la compétence ni l'autorisation de curer les soutes d'un navire, encore moins d'en traiter le contenu. Cette société va pourtant présenter au commandant du port l'agrément du ministre des Transports : une quittance de la redevance des droits d'usage des installations portuaires, une attestation en vue de déverser le slop à la décharge d'Akouédo, un village de la périphérie. Et, pour couronner le tout, un accord d'escorte douanière.
Devant ces documents, la direction générale du port délivre le sésame qui permettra à Tommy de mettre en branle l'impressionnante logistique pour l'enlèvement de 400 tonnes de déchets liquides du Probo Koala. Le 19 août, de 22 heures à 3 heures du matin, 17 camions-citernes vont faire la navette entre le port et la dizaine de sites dispersés dans les dix communes de la métropole. Le Probo Koala, débarrassé de son dangereux chargement, peut lever l'ancre. Et ce, malgré la mise en demeure adressée au capitaine du tanker par le Centre ivoirien d'antipollution (Ciapol), qui s'était aperçu du vrai contenu des cales du navire.
Démoustication. Lorsque les premières émanations envahissent la ville, le 20 août, les Abidjanais pensent à l'opération de démoustication annoncée la veille. Une ruse pour noyer l'odeur insupportable de ces déchets ? Le gouvernement mettra du temps à réagir. Le 2 septembre, le ministre de l'Environnement informe l'opinion du déversement de déchets toxiques sur plusieurs sites. La population lance une opération «commune morte». Devant la colère qui monte, l'Etat met en place un comité interministériel présidé par un proche du président Gbagbo. Deux jours plus tard, le comité lance un véritable SOS aux ambassadeurs des pays de l'UE. La Côte-d'Ivoire n'a ni les moyens techniques ni les médicaments pour soigner les malades qui affluent .
Les premières analyses faites dans les labos de la Société ivoirienne de raffinage donnent une idée approximative du produit : un mélange à base de pétrole contenant de la soude caustique à forte dose et de mercaptan, qui capte le mercure. Entre-temps, des rumeurs de radioactivité des déchets alarment les populations, qui prennent d'assaut les centres de soins. Paris envoie cinq experts. Le Premier ministre affirme que le contenu du tanker n'est pas radioactif. Une nouvelle accueillie avec scepticisme, vu le bilan provisoire de six morts et plus de 9 000 victimes intoxiquées.
Vomissements. Avant que les premières têtes tombent, le gouvernement de Charles Konan Banny démissionne le 6 septembre pour donner l'exemple. Une décision qu'Alassane Ouattara, un des leaders de l'opposition, qualifie de «non-événement». Pour lui, priorité doit être donnée aux sanctions et à la prise en charge des malades. Ceux-ci se voient en effet délivrer des ordonnances après des consultations qui n'établissent aucun diagnostic précis. Les seuls traitements prescrits sont destinés à lutter contre les effets (saignements du nez, vomissement, diarrhées, céphalées, toux...) de ces gaz. Quant aux arrestations, elles n'ont touché qu'une demi-douzaine de seconds couteaux pour le moment.
Les responsables se renvoient la patate chaude. Le ministre des Transports accuse le gouverneur de la ville, Pierre Amondji, un fidèle parmi les fidèles du chef de l'Etat, d'être complice des pollueurs. Ses services ont ouvert cette nuit-là la principale décharge d'Akouédo aux camions-citernes de la société Tommy. D'autres noms circulent dans la presse : Marcel Gossio, le directeur général du port autonome d'Abidjan, considéré comme l'un des financiers du pouvoir ; le patron de la douane, le colonel major Gnamien Konan, un autre homme de confiance de Gbagbo. C'est dans cette atmosphère puante de déchets et de corruption que les Ivoiriens, qui ont le génie de tout tourner en dérision, ont inventé la Toxica ou la danse du déchet toxique. Son concepteur, Bédel Ier avait déjà inventé, il y a quelques mois, la Danse de la grippe aviaire...

Wednesday, September 13, 2006

Des laveurs d’autos témoignent :“Oui ! Nous avons lavé deux camions-citernes de déchets toxiques à 10.000 F”


Le Patriote No. 2088 du Jeudi 14 Septembre 2006
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Les langues commencent à se délier et le scandale des déchets toxiques livre ses secrets. «Le Patriote» est entré en contact avec un groupe de jeunes spécialisés dans le lavage de voitures rendant à Abobo. Ils témoignent, dans l’interview qui suit, avoir lavé deux des camions citernes qui ont servi à transporter les déchets toxiques sur les sites de déversement.

Le Patriote : Monsieur Dobi Didi Marcel, dites-nous dans quelles circonstances vous avez lavé des camions-citernes contenant des déchets toxiques?

Dobi Didi Marcel : Je suis le chef d’équipe de ceux qui travaillent ici. Effectivement, j’ai lavé deux camions-citernes ici, le jeudi 24 août. Les camions sont arrivés dans notre “lavage” vers 18 heures. Et c’est de 20 H à 23 H que nous avons lavé les camions.

L.P. : Comment étaient les camions ?

D.D.M. : C’étaient des citernes de 12 roues d’une capacité de 30.000 litres chacune.

L.P. : Pouvez-vous nous décrire comment vous les avez lavés ?

D.D.M. : Mes deux petits apprentis ont lavé un camion. Mon ami et moi étions occupés à autre chose. Donc, on a laissé le second camion stationné sur place, le temps de finir. Ce sont les apprentis et le chauffeur en second qui ont supervisé l’opération de lavage avec nous. Le premier camion avait les couleurs bleue et blanche. Le second était gris avec des rayures rouges. Concernant le camion bleu et blanc, c’est le chauffeur en second lui-même qui a lavé la voiture.

L.P. : Quel genre de produit, ces camions citernes ont-ils l’habitude de transporter ?

D.D.M. : Ce sont des camions qui ont l’habitude de transporter du carburant. Mais, à mon avis, ces deux camions ont servi à transporter des déchets toxiques avant qu’ils n’arrivent dans notre lavage.

L.P. : Les chauffeurs vous ont-ils révélé d’autres choses?

D.D.M. : Je me souviens que l’un d’eux a dit que le CECOS a réussi à prendre les occupants de l’un des camions. Et qu’ils ont passé toute la nuit avec les agents. Il a donné aussi l’exemple d’un autre chauffeur qui a été chassé par son patron après qu’il ait transporté le même produit. Et que de peur de subir le même sort que ce collègue, il préfère lui-même laver son camion. Il a ôté ses habits. Il est descendu à l’intérieur de la citerne et il l’a lavé. Après, ils nous ont donné notre argent et ils sont partis comme ils sont venus.

L.P. : A combien avez-vous fait ce travail ?

D.D.M. : On a l’habitude de laver ce genre de camion citerne à 5000 F. Donc, le lavage des deux camions a coûté 10.000 F.L.P. : Vous avez accepté de laver des camions de déchets toxiques à ce prix au risque de votre vie ?

D.D.M. : C’est vrai. Mais, on ne savait pas que ces camions avaient servi à transporter des produits toxiques pouvant causer la mort. Si on l’avait su, on ne les aurait pas lavés. Ou bien si on acceptait de les laver, on aurait pris toutes les précautions et ce n’est pas à ce prix-là qu’on aurait fait le travail. Je vous ai dit que c’est un tarif qu’on applique d’habitude aux citernes.

L.P. : Mais, qu’est-ce qui vous fait dire aujourd’hui que ces deux camions avaient effectivement servi au transport de déchets toxiques ?

D.D.M. : C’est bien après. Quand les gens ont commencé à dénoncer les déchets toxiques et à décrire l’odeur de ce produit mortel, nous avons fait le rapport avec les deux camions que nous avons lavés sans savoir. C’est à partir de ce moment qu’on a compris l’attitude curieuse du chauffeur adjoint qui s’est entêté pour laver lui-même son camion.

L.P. : Connaissiez-vous les chauffeurs en question ?

D.D.M. : Non. On ne les avait jamais vus auparavant.

L.P. : Mais pourquoi avez-vous attendu jusqu’à 20 heures pour laver les camions qui sont arrivés à 18 heures dans votre lavage ?

D.D.M. : Quand ils sont venus, ils nous ont demandé de bien laver la voiture comme d’habitude. On lui a dit que c’est une heure de pointe pour nous. Parce que c’est à 18 heures que les wôrô-wôrô commencent à venir. Généralement à cette heure-là, on est très occupé. On leur a donc proposé d’attendre que nous finissions de laver les petites voitures avant de nous occuper des camions. Ils ont accepté et ils sont partis. Mais, un des chauffeurs nous a dit que son second viendra chercher le camion bleu- blanc après. Le chauffeur de l’autre est venu à bord d’une voiture personnelle. Il a garé le temps que nous finissions de laver vers 22 heures, 23 heures.

L.P. : Mais pourquoi les riverains se plaignent-ils pour dire que des déchets toxiques ont été déversés dans les égouts situés à côté de votre lavage ?

D.D.M. : Bien avant l’arrivée des 2 camions dans notre lavage, l’odeur des déchets toxiques avait déjà envahi tout le quartier. Et quand les riverains ont senti les mêmes odeurs sur les camions que nous avons lavés, ils ont vite fait de conclure que des déchets toxiques avaient été versés dans les égouts. Il n’en est rien. Aucun déchet toxique n’a été déversé ici. Ce que nous savons, c’est que l’eau de ruissellement, suite au lavage des deux camions, s’est propagée dans les égouts et a entraîné une odeur encore plus forte. (Il donne la parole à son collègue…).

Yoman Bi Irié Yannick : Je confirme tout ce que mon chef vient de dire. C’est la vérité qu’il vous a dite.

L.P. : Mais, personnellement comment as-tu vécu toute cette expérience ?

Y.B.I.Y. : Quand les camions sont arrivés, il n’ y avait personne au lavage. Sauf mon petit et moi (il désigne un gamin de 15 ans). Nous ne savions pas que c’étaient des camions de déchets toxiques. L’un des chauffeurs nous a remis un bidon d’essence. Et ils nous ont demandé de frotter le camion avec nos chiffons imbibés d’essence. Moi, personnellement, j’ai lavé le bas du camion gris. Il n’ y avait rien de suspect en bas du camion. Mais je sentais une odeur fétide provenant de la citerne. Mais, j’étais loin de savoir que c’était des odeurs de déchets toxiques. Dès que j’ai fini de laver le camion, je suis rentré à la maison. Je me souviens que cette nuit-là je ne me suis pas lavé. Parce qu’on avait fini très tard. Je me suis réveillé le matin à 6 heures et je suis allé faire du sport. Quand je suis revenu le soir au lavage, on m’a informé que c’est un camion de déchets toxiques que j’avais lavé la veille.
L.P. : Quelle a été ta réaction ?

Y.B.I.Y : J’étais très surpris.

L.P. : As-tu ressenti des douleurs plus tard ?

Y.B.I.Y : Les premiers jours, j’avoue que je n’ai rien senti. C’est cinq jours plus tard que j’ai commencé à ressentir des douleurs intenses à la gorge et à la poitrine. A part ça, je n’ai rien ressenti d’autre.

L.P. : Es-tu allé à l’hôpital pour consultation ?

Y.B.I.Y : Non. Je ne suis pas encore allé à l’hôpital.

Dobi (Ndlr un autre chauffeur) : Quant à moi, je suis allé à la maternité d’Abobo. On ma dit que là-bas, une équipe de prise en charge avait été effectivement mise sur pied. Mais qu’il n’y avait pas encore de médicaments disponibles. Alors, je suis reparti à la maison

Youan Bi Clé Alain : Ce jour-là, le camion gris est venu. Mon frère a dit d’attendre et que vers 21 heures, on allait commencer à laver le camion. Donc, à 21 heures, on a commencé le travail. Le chauffeur m’a obligé à monter sur le camion pour ouvrir la citerne. J’ai ouvert la citerne et j’ai lavé l’intérieur.

L.P. : Qu’est-ce que tu as remarqué quand tu as ouvert la citerne ?
Y.B.C.A. : J’ai été tout de suite frappé par l’odeur dégagée par ce que les gens appellent aujourd’hui les déchets toxiques. Franchement, je n’en savais rien. Quand on a fini de laver, je me suis rincé et je suis rentré chez moi vers 23 heures.
Khristian Kara
Le Patriote " sur les traces des auteurs du crime (Acte 2)


Interview /

Les chauffeurs des camions citernes :“Voici comment nous avons traversé la ville avec les déchets toxiques”

Le Patriote No. 2088 du Jeudi 14 Septembre 2006

« Le Patriote » a rencontré des Chauffeurs de camions citernes qui ont pris part au transport des déchets toxiques déversés dans le périmètre abidjanais. Ils expliquent comment ils ont été contactés et comment ils ont traversé la ville d’Abidjan avec les déchets. A leur demande, nous nous gardons de révéler leurs identités.

Le Patriote : Vous êtes tous les trois chauffeurs de camions citernes et vous avez participé au convoyage des déchets toxiques à la décharge d’Akouédo. Pouvez-vous dire la vérité aux Ivoiriens sur cette affaire ?
B.A : Effectivement, je suis chauffeur de citerne. Tout a commencé le samedi 19 août 2006. Ce jour-là à 10h M. Salomon nous appelle et il nous a dit qu’il y a de l’eau à déverser à la décharge d’Akouédo.

LP : Qui est Monsieur Salomon?

B.A. : C’est le responsable de la société Tommy. Et quand nous sommes arrivés, le bateau n’était pas encore là. Il est arrivé à 11h10mn et le temps d’accoster il était déjà 13 heures. En ce moment-là, il y avait les agents de la douane, de la société Tommy et des services d’hygiène publique.

LP : Parmi les personnes présentes, qui avez-vous reconnus?
B.A. : Franchement moi je ne les connais pas. Car, je ne suis qu’un simple chauffeur. Mais, ce que je peux attester c’est qu’il y avait beaucoup de véhicules, de la police, de la gendarmerie et des services d’hygiène. Quand le bateau a accosté, toutes ces personnes sont montées et ont fait une heure à une heure et demi à bord avant de redescendre. C’est ainsi qu’ils nous ont convaincu que c’était effectivement de l’eau qui sentait un peu mauvais mais que ce n’était pas grave. Ils nous ont même dit que des chimistes viendraient nous le confirmer plus tard. Un monsieur en costume que je ne connais pas a donc donné l’ordre de pomper le produit dans nos citernes.

LP : Mais combien vous ont-ils proposé pour votre prestation ?

B.A. : Effectivement, nous leur avons posé la question. Ils nous ont fait savoir qu’en principe le transport coûte 150.000 francs mais nous aurions à faire beaucoup de voyage et que c’était simplement de l’eau alors ils nous ont proposé 125.000 francs par camion et par voyage. Ce que nous avons accepté. C’est sur, ces faits que l’opération de pompage a débuté à 15 heures pour s’achever autour de 19 heures.

LP : Combien de camions y avait-il ?

BA : En ma présence, j’ai pu compter 10 camions citernes.


LP : Combien de voyage a effectué chaque camion ?

BA : Je ne sais pas combien de voyages ont pu efectuer les autres. Mais, moi particulièrement, j’ai fait un seul voyage. Quand j’ai pris mon premier chargement, je suis arrivé à Akouédo à 21 heures et j’y ai déversé le contenu. Ils m’ont proposé de revenir mais j’ai refusé parce que le produit sentait très mauvais. J’ai donc fait laver mon véhicule et je suis allé garer.

LP : Mais, à Akouédo, on ne vous a pas interpellé ? Qui vous a autorisé à y déverser le produit ?

BA : Quand nous partions à Akouédo, on avait toutes les autorisations possibles de la douane, du port et du district. On nous a donc laissé passer et on nous a montré où nous devions déverser le produit.
LP : Quelqu’un vous a-t-il accompagné à Akouédo ?

BA : Oui, il y a un véhicule qui nous a escorté jusqu’à Akouédo. Mais, comme nous ne savions pas qu’un scandale éclaterait nous n’avions pas pris le soin de prendre ses références mais c’était un véhicule personnel. A Akouédo, le monsieur qui en est descendu est un des collaborateurs de M. Salomon de la société Tommy. C’est d’ailleurs lui qui a présenté les documents à l’entrée de la décharge. Mais après, j’ai un ami qui m’a appelé et qui m’a dit que comme l’odeur des premiers chargements avait envahi la zone, les populations avaient alerté la police et la gendarmerie qui sont venues les interpeller.

LP : Que s’est-il passé par la suite ?

BA : Mon ami m’a révélé que le responsable de la société Tommy est venu échanger avec le Commandant de la brigade de gendarmerie qui les a, par la suite, libérés.

LP : A quel moment de l’opération avez-vous perçu votre argent ?

BA : Moi, particulièrement on m’a payé après ma prestation. Et nous ne savions pas que c’était un mauvais produit.

LP : Revenons à vos premiers propos. Qui avez-vous vu exactement autour du bateau ?

BA : J’ai vu le véhicule des services d’hygiène. Ils étaient dans des combinaisons blanches. Ils sont montés dans le bateau après 20 minutes, ils sont repartis. Après eux, la gendarmerie et la police du Port avec leurs véhicules sont arrivés avec des agents qui sont montés et en sont redescendus tout souriant avec des canettes de sucrerie en main. Ils sont aussitôt repartis.

LP : Donc les camions citernes ont été chargés en présence de tous ceux-là ?

BA : Oui, bien sûr. Puisqu’ils partaient et revenaient pendant que l’odeur dégageait. Et quand on a chargé, il y a eu des documents, des bons de sortie qui prouvent que l’opération avait été autorisée. Nos noms et prénoms se trouvent sur ces bons. Quand tu charges, on te remet une copie du bon de sortie. C’est d’ailleurs de là que la police a pu avoir l’immatriculation de nos véhicules. Je ne suis pas en mesure de vous produire la mienne parce qu’elle se trouve présentement dans mon camion que je ne peux approcher pour le moment. Bien sûr pour des raisons évidentes de précautions.

LP : Donc à croire vos propos, vous n’êtes pas responsables, encore moins, complices dans cette affaire ?

BA : Absolument pas. Nous avons été trompés et associés malhonnêtement à ce scandale. Nous n’avons rien reçu que 125.000 francs par camions et par chargement c’est tout. On charge, on part déverser et on nous paie l’argent puis on s’en va. Pour le reste, nous n’en savons rien.

LP : On raconte qu’un chauffeur de citerne est mort d’intoxication. Etes-vous allé voir votre état de santé ?

BA : Non, nous démentons cette information parce que nous nous connaissons tous. Et je peux vous assurer que tout le monde, chauffeurs comme apprentis, se portent bien.

LP : Le ministère de l’Intérieur a fait un communiqué pour vous demander d’apporter les camions pour nécessité d’enquête…

K.A : Oui. Nous avons vu le communiqué dans les journaux. Mais, nous avons peur. Parce que nous savons que la Côte d’Ivoire n’est pas un pays de droit. Si nous faisons l’erreur de partir là-bas, les gens nous garderons et personnes n’irai prouver notre innocence. Sinon, nous sommes prêts à collaborer mais nous avons peur. Et puis, notre présence peut ne pas être obligatoire à partir du moment où nous citons la police et la gendarmerie du port. Nous pensons que ceux-là peuvent rétablir la vérité et blanchir les chauffeurs.

LP : Pendant que nous y sommes est-ce que vos camions ont été escortés par la Douane ?

BA : Non. Je vous l’ai déjà dit, la Douane ne nous a pas escorté comme prévu. On nous l’avait promis, mais après rien. C’est plutôt un civil de Tommy qui nous a escorté. Et puis, en vérité, nous ne faisons pas ce travail. Nous sommes chargés du transport de carburant. Quand on a pris contact avec nous, notre seul souci était de nous faire un peu d’argent le week-end et reprendre notre travail le lundi 21 août 2006. Mais, malheureusement le sort en a décidé autrement.

LP : Quels sont vos liens avec les responsables de Tommy ?

BA : A vrai dire, nous avons connu M. Salomon dans le cadre de notre travail. Quand les bateaux viennent en Côte d’Ivoire et qu’on doit les ravitailler en carburant, ils passent des commandes avec Salomon qui est l’intermédiaire avec les compagnies pétrolières. Donc, quand nous venons, c’est lui qui nous aide à charger le carburant. C’est dans ce cade là que nous l’avons connu.C’est ainsi qu’il nous a informé de la création de sa société. Mais, comme il n’avait pas de camions pour lui-même, il a souhaité qu’on l’aide à évacuer l’eau sale du « Probo Koala ».

HD : A la suite de mon ami, je voudrais dire que nous avons pensé simplement que nous pouvions nous faire un peu d’argent, mais nous ne savions pas les dessous de l’affaire. On veut bien dire tout ce qu’on nous a dit à la police, mais nous avons peur.

KA : Effectivement, comme il l’a dit, nous ne dormons même plus chez nous. Si nous étions effectivement impliqués dans le scandale et que nous avions reçus de gros montants, nous servions déjà partis du pays. Vous voyez beaucoup d’entre nous ont accepté sans l’accord de leurs patrons et aujourd’hui ils sont dans la merde. Car c’est clair qu’ils vont perdre leur travail.

LP : Vous avez dit tout à l’heure que le Commandant de la gendarmerie est venu prendre des chauffeurs puis les a relâchés après avoir perçu de l’argent. Qui lui a donné cet argent ? Les chauffeurs ou qui ?

BA : Mais, les chauffeurs mêmes ont eu combien pour en donner au Commandant de la gendarmerie ? Ce sont les responsables de Tommy qui ont discuté avec lui. Ils lui ont fait croire que ce n’était pas grave. Mais, le dimanche 20 août 2006, il est revenu quand l’affaire a pris de l’ampleur.

LP : Mais, en ce moment, il avait déjà reçu de l’argent ?

BA : Je ne peux pas l’affirmer mais vous savez qu’en Côte d’Ivoire, on ne peut pas arrêter quelqu’un pour une telle affaire et le relâcher aussi vite sans avoir été corrompu.

BA : Nous en ce qui nous concerne, nous demanderons pardon à la nation. Nous avons été trompé ou induit en erreur. Si nous l’avions su nous ne nous serions pas impliqués.

Réalisée par Coulibaly Moussa
Côte d`Ivoire: enlèvement immédiat des déchets toxiques préconisé, 15.000 consultations

AFP - 9/13/2006 12:05:56 PM

ABIDJAN (AFP) - mercredi 13 septembre 2006 - 17h37 - Les autorités médicales ivoiriennes faisaient face mercredi à un afflux croissant d'Abidjanais inquiets des conséquences sur leur santé des déchets toxiques, dont les experts en pollution français dépêchés sur place préconisent l'enlèvement immédiat et l'isolation.Le ministère de la Santé a enregistré au total depuis la fin août plus de 15.000 (15.749 exactement) consultations médicales pour des symptômes liés aux émanations des déchets, a indiqué mercredi à l'AFP son chargé de communication, Siméon N'Da.

Le nombre de cas graves reste cependant limité selon le ministère, qui recense "23 hospitalisations" et "six décès".

Le précédent bilan, fourni mardi, faisait état de 10.000 consultations, une dizaine d'hospitalisation et six décès, dont quatre enfants.Le nombre de personnes intoxiquées est toutefois inférieur à celui des consultations, plusieurs malades ayant pu consulter plusieurs fois les médecins, précisent les autorités.M. N'Da s'est inquiété mercredi de "la psychose" engendrée par cette affaire, "qui favorise (la) forte affluence des populations" dans les 36 unités de soins mises en place par le gouvernement face à la crise." Pour la seule journée d'hier, nous avons eu 3.700 consultations", contre 1.000 à 1.500 par jour les jours précédents, a souligné M. N'Da.Pour répondre à ce flux croissant, le ministère de la Santé a annoncé mercredi le recrutement de 1.031 "jeunes médecins, chirurgiens dentistes et pharmaciens" actuellement au chômage.
L'équipe de six experts en pollution français dépêchée en fin de semaine dernière à Abidjan a rendu mardi soir son rapport au Premier ministre Charles Konan Banny, qui devrait le rendre public dans la semaine.

Selon une source proche du dossier, les experts y préconisent un enlèvement "d'urgence" des déchets, et leur isolation immédiate.

Ils proposent ensuite deux options pour les neutraliser: soit les traiter sur place, soit les confier à une société spécialisée qui viendrait les chercher et les emporterait chez elle pour le traiter, selon cette source.
Les experts précisent toutefois qu'une bonne partie des substances toxiques déversées se sont évaporées depuis la fin août, ce qui a considérablement réduit les risques d'intoxication par inhalation. Il convient toujours toutefois selon eux d'éviter la proximité immédiate des déchets.

Ils notent que le réseau de distribution d'eau potable d'Abidjan, qui compte près de 4 millions d'habitants, n'a pas été atteint.

Mais ils soulignent qu'une partie des déchets a contaminé le réseau d'eau pluviale (ruisseau, lagune) de la ville.

En présentant ce rapport, M. Banny devrait annoncer plusieurs mesures "drastiques" pour protéger la population, concernant notamment la consommation de légumes ou de poissons dans les zones proche des sites pollués.
Selon les derniers chiffres fournis par les autorités ivoiriennes, 528 tonnes de produits toxiques ont été déchargés fin août du navire grec Probo Koala par une compagnie ivoirienne, qui en a déversé une bonne partie au moins dans quatorze sites (décharges et points d'enlèvement des ordures) de la ville.

La solution toxique se compose notamment de résidus de raffinage, de sulfures, de phénols et de mercaptans, selon les experts.

Selon le négociant international Trafigura, affréteur du Probo Koala, elle est issue du mélange de résidus pétroliers et de la soude caustique utilisée pour nettoyer les cuves après chaque déchargement.
Effet collatéral de cette pollution, les tas d'ordures nauséabonds ont poussé comme des champignons ces derniers jours dans les rues d'Abidjan, faute de pouvoirs être emportés dans les décharges publiques, fermées après avoir été polluées par les déchets toxiques.


Déchets toxiques : Mme Gbagbo au cœur du scandale


Le Jour - lundi 11 septembre 2006


Marcel Gossio

Une semaine après la découverte du scandale des déchets toxiques déversés à Abidjan et qui ont déjà causé cinq morts et plusieurs milliers d’intoxiqués, les enquêtes établissent des responsabilités au cœur de l’Etat. Des sources confidentielles révèlent la participation de la Première Dame Simone Ehivet Gbagbo aux débuts des opérations avec son concours pour la formation de la société Compagnie Tommy. En complicité avec le DG du Port Autonome d’Abidjan Marcel Gossio et le Gouverneur du District d’Abidjan Djédji Amondji Pierre. Le chef de l’Etat Laurent Gbagbo, selon nos sources, a été bel et bien informé. «Mais l’homme a fermé les yeux là-dessus, ayant été induit en erreur par Marcel Gossio sur la toxicité des déchets », précise la même source. Rebondissement dans l’affaire des déchets toxiques déversés à Abidjan qui ont fait déjà cinq morts et plusieurs milliers de personnes intoxiquées. Les investigations ont révélé la piste du Palais de la Présidence, comme cerveau du ‘’Probo Kaola-gate’’. Une source introduite confirme les révélations de Iorgos Kouleris, directeur des opérations de la Compagnie Prime Marine Management Inc, propriétaire du navire Probo Koala, qui a déclaré jeudi dernier à l’Agence France-Presse que ‘’cette opération était parfaitement légale ; nous sommes désolés, mais nous déclinons toute responsabilité’’. Elle donne de plus amples détails sur la transaction des déchets mortels sur la Côte d’Ivoire. En effet, soutient notre source, ‘’la Compagnie Prime Marine Management Inc, propriétaire des navires Probo Koala a écrit au Directeur Général du Port Autonome d’Abidjan Marcel Gossio pour l’informer du vidange de déchets toxiques au Port d’Abidjan pour la somme de 17 milliards de Fcfa’’. Nous sommes au début du mois de juillet. Gossio, Amondji, Simone Gbagbo, le cerveau du complot Marcel Gossio prend attaches avec le Gouverneur du District d’Abidjan, Djédji Amondji Pierre. Puisque le navire battant panaméen, Probo Koala, transportait à la fois des cargaisons liquides et solides qu’il n’arrive pas à décharger depuis plusieurs mois. Gossio et Amondji sollicitent le concours de Mme Simone Ehivet Gbagbo. La Première Dame pèse très lourd dans les décisions importantes du Palais Présidentiel. Le trio Amondji –Simone Gbagbo-Gossio se forme, en vue de réceptionner les déchets. Ce dernier prend le soin de rassurer le chef de l’Etat Laurent Gbagbo ‘’qu’il ne s’agit pas de déchets toxiques’’. Corroborant les explications du patron du Probo Koala qui soutient : ‘’Il ne s’agissait pas d’une cargaison toxique mais de déchets de précédentes cargaisons rendus toxiques par réaction chimique’’. Le chef de l’Etat Laurent Gbagbo ‘’va donc laisser faire, puisque pour lui, il ne s’agit pas de déchets toxiques qui peuvent tuer des Ivoiriens’’. La quantité de déchets attendue n’était pas de 400 tonnes. Elle était plus importante. Un changement de 5000 tonnes état prévu après celui du mois d’août. Le Gouverneur du District d’Abidjan est sommé par le chef de l’Etat d’entreprendre une campagne de démoustiquation à cette période. D’où le communiqué radiodiffusé de Amondji Djédjé Pierre qui annonce une telle opération de salubrité pour la date du 19 août, le jour même où le Krobo Koala a commencé à déverser les déchets toxiques. La compagnie Tommy réunit tous les documents pour son agrément Les dispositions de protection ( ?) de la santé et de l’environnement prises, Mme Gbagbo, Gossio et Amondji décident de créer une société écran, la Compagnie Tommy pour récupérer les déchets toxiques. Le dossier technique pour l’obtention d’un agrément d’Avitailleur Maritime est vite constitué et est complet dans sa composition. La somme de 46 millions de Francs Cfa a servi de pots-de-vin pour l’ensemble des Directeurs Généraux, des ministres qui ont eu à intervenir et à signer les dossiers de Tommy. Notre source révèle que le ministre des Transports Anaky Innocent n’a touché que la modique somme avoisinant 5 millions de Fcfa que des responsables reçoivent habituellement après signature d’un tel agrément. « Tommy avait tous les papiers et aucun ministre ne pouvait lui refuser un agrément dans ces conditions », précise notre source. Gbagbo et Banny ont caché la vérité au peuple Ainsi donc , les principaux responsables du Port Autonome d’Abidjan, des Douanes, du District d’Abidjan, etc. ont été mobilisés pour que Probo Koala déverse les déchets toxiques à Abidjan sans incidents. Les responsables de Probo Koala ont même affirmé dans la presse française qu’ils ont adressé un fax au Premier ministre Charles Konan Banny. Toutes choses qui les amènent à affirmer aujourd’hui à la face du monde entier que ‘’toute l’opération était parfaitement légale ; ce que nous pouvons comprendre est que Tommy a disposé ses déchets comme elle n’aurait pas dû le faire’’. Le chef de l’Etat Laurent Gbagbo et le Premier ministre Charles Konan Banny ont-ils des arguments pour leur défense ? Le gouvernement ne peut convaincre au vu des nombreuses attitudes de complaisance ou de complicité tout au long de l’opération. La Côte d’Ivoire dispose de services de renseignements généraux, classés parmi les meilleurs du monde (Sic !). L’on comprend difficilement qu’un bateau pollueur, signalé dans les eaux de l’Océan Atlantique depuis plusieurs mois, vienne accoster tranquillement dans l’un des plus gros ports de la sous-région, y décharge des déchets toxiques deux jours durant, sans que le chef de l’Etat, le Premier ministre, les services de Sécurité ne soient alertés. Les autorités ivoiriennes ne s’agitent que lorsque les populations sortent pour manifester leur mécontentement. Ne pouvant plus supporter les odeurs mortelles qui ont commencé à faire des milliers de victimes. Pis, le gouvernement s’acharne à étouffer les manifestations en gazant au lacrymogène les habitants de Plateau Dokui faisant de nombreux blessés. Des responsables du collectif des victimes des déchets toxiques dénoncent les pressions des politiques… Ce n’est donc pas étonnant que des implications dans l’entourage même du chef de l’Etat Laurent Gbagbo sont mises au grand jour. Proba Koala n’a pas encore livré tous ses secrets. Affaire à suivre ! Edouard Gonto
Déchets toxiques à Abidjan : Greenpeace fait le point




Abidjan, Cote d'ivoire — Quelle est la nature des déchets déversés en plein air sur onze sites différents d’Abidjan en Côte d’Ivoire? Quel impact sur la santé et sur l’environnement? A qui la faute?

Devant la complexité des questions soulevées par la catastrophe écologique et sanitaire dont est victime la capitale économique de la Côte d’Ivoire, quelques précisions s’imposent, en attendant les communications officielles des experts qui sont sur le terrain : une mission de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), une autre envoyée par les Nations unies (l’Undac), la mission française conjointe du BRGM (Bureau de recherche géologique et minière) et du Cogic (Comité de gestion interministérielle des crises).

1/ Concernant la composition chimique de ces déchets, on estime qu’il s’agit d’une boue riche en hydrocarbures, contaminée par au moins trois éléments : de l’hydrogène sulfuré (très toxique par inhalation), des mercaptans (composés soufrés) et de la soude caustique. Sur le plan sanitaire, l’hydrogène sulfuré peut provoquer des irritations des muqueuses et voies respiratoires jusqu’à la mort par empoisonnement du sang, en passant par des nausées ou des vertiges. Ces produits présentent aussi une nocivité très forte pour l’environnement, qui peut s’avérer catastrophique s’ils devaient atteindre les nappes phréatiques ou le milieu marin. Certains experts mentionnent également la présence d’organochlorés, ce qui rendrait cette pollution encore plus grave (ces polluants persistent dans l’environnement et pénètrent la chaîne alimentaire).

2/ Du côté des responsabilités locales, il appartient au gouvernement ivoirien de les établir, sous la supervision de l’Onuci, la mission de paix des Nations-Unies en Côte d’Ivoire, afin de garantir une justice complète et équitable dans la situation politique actuelle. Il est évident que rien n’a pu arriver sans l’implication de plusieurs acteurs ivoiriens, publics et privés. En première ligne, le Port autonome d’Abidjan, qui n’a pu agir sans des complices au sein des ministères de tutelle (Industrie, Environnement et/ou Transports). Suivent les prestataires de services tels la société Tommy qui a effectué le pompage des déchets depuis le bateau et le déversement des toxiques dans onze sites de la ville, la société WAIBS, agent du Probo Koala, ou encore l’intermédiaire local Puma Energy, par ailleurs, filiale de l’affréteur Trafigura.

3/ Mais Greenpeace veut surtout comprendre la chaîne de responsabilités premières qui a permis aux déchets toxiques de parvenir jusqu’à Abidjan. Deux scénarios sont possibles, qui déterminent la qualification des déchets et donc le cadre juridique international qui s’applique.

Première hypothèse : à en croire la société Trafigura, trader international et affréteur du Probo Koala, les déchets seraient des « slops », c’est-à-dire des eaux de lavage, générées par le nettoyage des cuves du bateau transportant régulièrement des produits pétroliers. Selon Trafigura, ce nettoyage s’effectuerait, en routine, avec de la soude caustique. N’ayant pu être délivrés à Amsterdam comme prévu mais plus d’un mois plus tard à Abidjan, les déchets auraient fermenté durant le trajet, devenant de plus en plus toxiques. Selon ce scénario, ces déchets devraient être considérés comme le résultat d’activités maritimes et à ce titre régis par la convention Marpol émise par l’Organisation maritime internationale (OMI). L’affréteur Trafigura serait alors exonéré de toutes responsabilités (au sens de Marpol). Celles-ci incomberaient à deux pays : le pays de pavillon, Panama (autant dire nulle part) et le pays du port d’accueil, la Côte d’Ivoire. Plusieurs éléments peuvent mettre en doute ce scénario. La forte teneur en hydrogène sulfuré peut-elle résulter de la seule évolution du déchet au cours du voyage ? De simples eaux usées, même très polluées, peuvent-elles présenter une teneur en carbone organique proche de 21g/l et une masse volumique plus proche de l’essence pure que de l’eau de lavage polluée ? (source Ciapol)

Deuxième possibilité : au lieu d’être le fruit de la seule activité du navire, les déchets toxiques proviendraient d’industries de raffinage de pétrole ou de gaz installées à terre. Ces industries utilisent de la soude caustique soit lors de la désulfuration de ces hydrocarbures, soit lors d’opérations de nettoyage de leurs cuves de stockage. Ces déchets toxiques produits à terre relèveraient de la convention de Bâle, qui émane du Programme des Nations unies pour l’environnement (Pnue) et interdit les transferts de déchets des pays de l’OCDE vers les pays non membres de l’OCDE. Dans ce cas, les responsabilités reviendraient à l’affréteur Trafigura ainsi qu’au pays du dernier port d’accueil de ces déchets. Là, difficile à ce stade de déterminer avec certitude s’il s’agit des Pays-Bas, de l’Espagne ou de l’Estonie.

Quelque soit le scénario, Greenpeace considère que l’entreprise Trafigura porte une responsabilité morale écrasante dans cette catastrophe. Dans un cas, elle a cherché à se faufiler dans les vides juridiques, les zones de non-droit et l’opacité des réglementations maritimes. Dans l’autre, Trafigura s’est mise en infraction flagrante avec le droit international.

4/ Le trajet du Probo Koala. Une certitude : le 2 juillet, le Probo Koala quitte le port d’Amsterdam avec à son bord des produits « similaires » à ceux déversés sur Abidjan. Selon Trafigura, cette escale avait pour but la vidange de ces fameux « slops ». Après les avoir effectivement déchargés à Amsterdam, Trafigura a choisi de rembarquer ses déchets, au vu des conditions (a priori financières) proposées par la société néerlandaise de gestion des déchets. Toujours selon l’affréteur Trafigura, les autorités des Pays-Bas auraient contrôlé la conformité de ce ré-embarquement et, après certaines garanties, accepté le départ du navire.

Entre le 2 juillet et le 19 août, quelle fut la route du Probo Koala ? Pour certains, il s’est arrêté en Espagne au port d’Algeciras. Pour d’autres, il a navigué le long des côtes africaines à la recherche d’un port d’accueil. Le Sénégal aurait été sollicité ainsi que le Nigeria. Enfin, après avoir déversé ses déchets et malgré un début d’enquête, le bateau a été autorisé par le Port autonome d’Abidjan à appareiller en direction de l’Estonie.

Scandale des déchets toxiques : L’enquête se trompe de cible

Le Jour - mercredi 13 septembre 2006

Par un courrier en date du 7 septembre, le procureur de la République près le tribunal de première instance d’Abidjan-Plateau a été saisi par le président de la République à l’effet de diligenter une enquête autour de l’affaire des déchets toxiques. L’instruction qui n’a pas tardé à identifier les premiers responsables de ce crime odieux a permis d’écrouer sept personnes sur qui pèsent de lourds soupçons de culpabilité. Cette même enquête a débouché sur la conduite du journaliste Edouard Gonto de Le Jour Plus et du directeur de publication Coulibaly Seydou à la brigade de recherche. Il est reproché au premier cité d’avoir écrit un article au vitriol incriminant le couple présidentiel comme étant le cerveau de cette scabreuse affaire de déchets toxiques. Pourtant, dans cet article qui n’est ni plus ni moins qu’une contribution à la manifestation de la vérité, l’auteur n’a à aucun moment tenu le chef de l’Etat, responsable du scandale des déchets toxiques. S’il l’a cité, c’est pour relever qu’il a été abusé par ceux de son entourage trempés dans cette affaire qui ne lui auraient pas dit la vérité sur la nature réelle des déchets. L’auteur de l’article ne peut donc être poursuivi pour offense au chef de l’Etat. Ce qui laisse penser que le motif de son arrestation se trouve ailleurs que dans les propos à l’égard du chef de l’Etat. Sinon, ce serait faire une grande confusion entre la personne du chef de l’Etat et la première dame en matière de délit de presse. A moins que la justice ait décidé de créer cette unicité entre les deux personnalités. S’agissant de la première Dame, il est revenu au journaliste dont la plume lui vaut aujourd’hui de connaître l’univers du milieu carcéral que Mme Gbagbo aurait permis par son intervention à la société Tommy d’obtenir son agrément qu’il a outrepassé. Agrément qui est dénoncé par certaines personnes comme complaisant. Si donc le fait de permettre l’obtention d’un agrément fantaisiste ne peut être assimilé à une preuve irréfutable de culpabilité, si tant est que les faits sont avérés, il ne s’en écarte pas totalement. Mais au-delà de tout, il n’est un secret pour personne que des hauts responsables nommément cités dans l’affaire des déchets toxiques respirent encore l’air frais pendant que ceux qui cherchent à contribuer à la manifestation de la vérité croupissent en prison. C’est cela aussi la refondation.
Scandale des déchets toxiques : deux journalistes de Le Jour Plus arrêtés ; On veut étouffer l’affaire

Le Jour - 9/12/2006 10:11:18 PM

Vouloir cacher les arbres de la forêt avec la main. C’est le premier sentiment qui a animé bon nombre de lecteurs du quotidien Le Jour plus qui ont constamment appelé à notre standard, hier suite à la convocation du directeur de publication et de Gonto Edouard, l’auteur de l’article litigieux par le procureur de la République. Dénonçant certaines légèretés dans la gestion du dossier des déchets toxiques. Ainsi, en lieu et place de rechercher les solutions visant à neutraliser les produits dangereux et punir les coupables, des pontes du régime ont décidé de museler la presse. Afin d’empêcher la manifestation de la vérité. Vaille que vaille, la vérité éclatera au grand jour. Qui a autorisé le déversement des déchets toxiques à travers le district d’Abidjan ? Qui sont leurs complices ? Comment sauver les populations des effets collatéraux de ces produits hautement toxiques qui ont déjà causé mort d’hommes ? Comment assurer une prise en charge efficiente et totale des milliers de victimes ? Voici les questions fondamentales dont les Ivoiriens et la communauté internationale attendent des réponses claires et nettes. Plus de deux semaines, les enquêtes ouvertes ici et là peinent à situer les responsabilités en dehors, dit-on, d’une dizaine d’arrestations de seconds couteaux. Pendant que le nombre de victimes s’alourdit au fil des jours. C’est dans cette volonté de contribuer à la manifestation de la vérité que le quotidien Le Jour plus a publié lundi dans ses colonnes un article, non pas accusateur, mais dénonçant la mauvaise information du chef de l’Etat sur le contenu du bateau pollueur. Et c’est à juste titre que I. Kouleris, directeur des opérations de la compagnie Prime Marine management Inc, propriétaire du navire Probo Koala a déclaré à la presse française “ que cette opération était parfaitement légale, nous sommes désolés, mais nous déclinons toute responsabilité ”. Mais au lieu d’explorer les pistes de réflexions dégagées par le quotidien indépendant, des gros bonnets tapis dans l’ombre ont décidé de choisir la voie de l’intimidation en convoquant les journalistes. Mais le peuple de Côte d’Ivoire et la communauté internationale le premier, victime et le second suivant attentivement le dossier ne sont pas dupes. En lieu et place d’atténuer la souffrance du peuple, on décide de museler la presse en arrêtant nos confrères. Une grave atteinte à la liberté de la presse.

Et de quelle manière ? Un procureur sans instruction préalable ordonne l’arrestation d’honnêtes citoyens dans l’exercice de leur fonction. Cet épisode aujourd’hui fonde plus que jamais la culpabilité des gros bonnets du régime dans le scandale. L’Onu de son côté a décidé de jouer sa partition dans cette affaire qui fera tache d’huile sous la II République. Arrêter tous les animateurs de la rédaction de Le Jour plus ne pourra pas freiner le cours de l’histoire et la manifestation de la vérité. Pour notre part, cette cabale parce que Le Jour plus dérange par son courage à informer, à dénoncer la corruption et la prévarication qui prospèrent sous la refondation. En s’érigeant en règle de gouvernance. Les arrestations n’émoussent en rien notre ardeur à traquer la vérité. A mettre à nu tous les coupables dans cette sale affaire de corruption à outrance. Et ce n’est pas le torchon rouge de la violence qui nous détournera de ce chemin. Une chose est sûre, les responsables pollueurs ne jouiront pas de cette manne sur le corps des Ivoiriens. En tous les cas, dire que le chef de l’Etat a été mal informé avant l’arrivée du Probo Koala dans les eaux territoriales ne devrait pas constituer un délit. Nos sources restent formelles. Il y a bel et bien une opération savamment menée par ses auteurs au “goût du lucre immodéré. Et qui courent malheureusement toujours.

Koumantigui

Affaire déchets toxiques - L’ONU annonce la découverte du liquide mortel dans la mer et la lagune

Le Courrier D'Abidjan

Mercredi 13 Septembre 2006




Un "nombre important" de déchets toxiques ont été déversés dans la mer, la lagune d'Abidjan et à proximité des zones maraîchères, ce qui fait craindre une pollution de la chaîne alimentaire, a prévenu mardi le coordonnateur humanitaire des Nations unies en Côte d'Ivoire.
"Des sources sûres indiquent qu'un nombre important de déchets ont été déversés dans la mer et dans la lagune ainsi qu'à proximité des zones maraîchères", indique Youssouf Omar dans un communiqué sur l'affaire des déchets toxiques d'Abidjan.
Cette situation "redouble les inquiétudes quant à de possibles effets polluants sur la chaîne alimentaire", ajoute-t-il, en soulignant que si "onze sites de déchets toxiques ont été identifiés à ce jour, d'autres sites risquent d'être découverts".
"Les estimations officielles font état de six décès, dont quatre enfants, et plus de 8.000 personnes (le gouvernement a fait état mardi d'un total de 10.000 consultations, ndlr) enregistrées dans les 32 structures sanitaires (publiques)", rappelle par ailleurs M. Omar.
Il indique également que "sur la requête du gouvernement ivoirien, une enquête sera ouverte par une structure onusienne sur les transports frontaliers et déversements de substances toxiques à travers le secrétariat de la convention de Bâle".
L'Onu a par ailleurs fourni au ministère ivoirien de la Santé une première aide en médicament d'une valeur de 25 millions de FCFA (environ 38.000 euros) pour équiper les 32 structures sanitaires sélectionnées dans le cadre de la gestion de la crise des déchets toxiques, indique-t-il.
Des milliers d'habitants d'Abidjan ont été intoxiqués par les émanations de plusieurs centaines de tonnes de déchets chimiques déversés dans la nuit du 19 au 20 août dans une dizaine de décharges publique de la ville par une compagnie ivoirienne qui les avait déchargés d'un navire grec.



Incriminée dans l’affaire des déchets toxiques - La Douane aplanit ses difficultés avec le Chef de l’Etat

Le courrier d'abidjan
Parution N° 814 du Mercredi 13 Septembre 2006

le colonel major Gnamien Konan


Depuis quelques jours, la Côte d’Ivoire, éprouvée par quatre années de crise politico-militaire, vit un nouveau drame. Elle est frappée par une catastrophe écologique sans précédent. Dans cette nouvelle crise, certaines personnalités dont la responsabilité semble être engagée à partir des enquêtes préliminaires ont été mises aux arrêts. Au nombre de celles-ci figurent trois agents des Douanes. L’arrestation de ces agents de Douane a provoqué le courroux de leurs frères d’armes et en particulier des quatre syndicats que compte la Douane. Qui, par solidarité, ont manifesté leur mécontentement par la fermeture des dépôts de carburant et de gaz. Ce qui a provoqué une pénurie de ces denrées. Pour trouver une issue rapide à cette pénurie de carburant et de gaz qui risque d’en rajouter aux nombreux problèmes existants, le Chef de l’Etat a reçu hier en audience les responsables syndicaux de la Douane, certains agents des Douanes de Vridi Pétrole et la direction générale de ce corps de métier pour en savoir davantage sur l’implication ou non de la Douane dans les désastres causés par les déchets toxiques déversés à travers le District d’Abidjan. Pendant près de deux heures, le président de la République a discuté avec les agents de la Douane en présence des ministres Emmanuel Monnet Léon des Mines et de l’Energie, de Hubert Oulaye de la Fonction publique et de Charles Diby Koffi, délégué à l’Economie et aux Finances. Au cours de cette audience, le directeur général de la Douane, le colonel major Gnamien Konan, aurait fait une importante communication pour mieux éclairer le président de la République sur la non implication de la Douane dans l’affaire des déchets toxiques. Et le porte-parole des quatre syndicats de la Douane, Bongo Allah Oré, secrétaire général des syndicats libres des agents des Douanes, de corroborer ce que son DG a dit. Pour lui, les trois agents des Douanes «ont été injustement arrêtés alors que nos camarades n’ont fait que faire leur travail», a-t-il soutenu avec force. A la suite de l’entretien qu’ils ont eu avec le Chef de l’Etat, les douaniers, par la voie de leur porte-parole, ont affirmé que le président de la République a eu une oreille attentive à leurs préoccupations. C’est pourquoi, ils comptent reprendre le travail qu’ils avaient suspendu. «Depuis cet après-midi (NDLR, hier mardi), tous les dépôts fermés sont ouverts. Nous disons donc à la population qu’elle peut trouver le carburant et le gaz sur le marché», a conclu M. Bongo, à la satisfaction de ses nombreux collègues qui l’entouraient.
Irresponsables mais pas coupables ?

La Lettre du Continent N°501 du 14/09/2006 - (3) -


Le déversement sur huit décharges publiques de 528 m3 de déchets toxiques, en particulier de l'hydrogène sulfuré, provenant de résidus d'hydrocarbures, aurait fait descendre dans la rue toute la population d'une capitale d'un pays démocratique. Depuis le 19 août, près de 10 000 Abidjanais souffrent de troubles respiratoires et on déplore déjà plusieurs morts. La crise politique que connaît la Côte d'Ivoire a occulté - à ce jour - cet acte d'irresponsabilité majeur. Le trader Trafigura Beheer, propriétaire de cette cargaison mortelle, avait prévenu de la haute toxicité de ces déchets (e-mail du 17 août de Jorge Luis Marrero au capitaine Kablan). Or, son traitement a été confié à la SARL Tommy, au capital de 2 millions F CFA du Nigérian Salomon Ugborugbo. Agréée le 7 juin 2006, cette société ne dispose que de deux salariés confinés dans un petit bureau… Le bateau transporteur, le Probo Koala, a pu vider ses cuves alors qu'il est précisé dans les mesures de sécurité du "permis de travail" signé le 19 août par la Petroci (quai de débarquement) "l'arrêt des travaux en cas d'odeur suspecte". Ce n'est que le 22 août que le DG, Fadika Kassoum, a précisé "la nouvelle procédure d'enlèvement de slops au quai Petroci Holding". Comment sept camions citernes loués à la SIR ont-ils pu sortir de nuit du PAA (Port autonome d'Abidjan) sans que les dirigeants ne soient prévenus ? Sans parler des douaniers… Le seul montant du contrat - 4 milliards F CFA - n'a pas manqué de tinter aux oreilles des responsables ivoiriens. Il est à la hauteur de la mortelle livraison. Le gouvernement a démissionné mais seuls des lampistes ont pour l'instant été arrêtés. Le premier ministre Charles Konan Banny aurait été menacé par les partisans de Laurent Gbagbo s'il désignait du doigt les vrais responsables de ce drame. Irresponsables mais pas coupables ?
Les déchets toxiques à Abidjan ont déjà fait 6 morts et 9.000 intoxiqués
LEMONDE.FR avec AFP et Reuters 12.09.06 19h10 • Mis à jour le 12.09.06 20h22

La crise sanitaire en Côte d'Ivoire s'avère bien plus sévère que ce que les premiers chiffres avaient révélé. "Nous avons recensé au total à ce jour 8 887 personnes venues consulter les centres de santé", a déclaré, lundi 11 septembre, Jean Denoman, du ministère de la santé. "Ces chiffres vont aller en augmentant, car nous accueillons entre 1 000 et 1 500 personnes par jour." Et six personnes ont déjà été tuées par les émanations des déchets toxiques déversés à Abidjan.


A Abidjan, la mer et la lagune sont également contaminées, selon l'ONU

Les décharges d'Abidjan ne sont pas les seules à avoir été polluées par des déchets toxiques. Un "nombre important" de déchets ont également été déversés dans la mer, dans la lagune d'Abidjan et à proximité des zones maraîchères, ce qui fait craindre une pollution de la chaîne alimentaire, a prévenu mardi Youssouf Omar, le coordonnateur humanitaire des Nations unies en Côte d'Ivoire."Onze sites de déchets toxiques ont été identifiés à ce jour, d'autres sites risquent d'être découverts", a-t-il ajouté. – (Avec AFP.)
[-] fermerLa présidence ivoirienne a annoncé lundi la construction d'un bunker destiné à recevoir les déchets toxiques, ainsi que la mise en place d'une cellule chargée de suivre la crise en temps réel. Elle a également rappelé que 36 centres de santé et 2 unités de soins mobiles ont été mis gratuitement à la disposition des personnes intoxiquées.
581 TONNES DE PRODUITS TOXIQUES
Six experts français spécialistes du traitement des déchets toxiques sont arrivés vendredi pour épauler la mission des Nations unies présente sur place. L'ambassade de France à Abidjan a confirmé lundi que les produits toxiques étaient des "sous-produits liquides de l'activité pétrolière contenant des hydrocarbures, des mercaptans et divers produits soufrés".
Selon le ministère du plan ivoirien, 581 tonnes de produits toxiques ont été déchargées du navire Probo-Koala dans une dizaine de décharges de la capitale économique ivoirienne, dans la nuit du 19 au 20 août. Si le Probo-Koala bat pavillon panaméen, il appartient à la compagnie grecque Prime Marine Management Inc. et a été affrété par la multinationale Trafigura, située aux Pays-Bas. Quant au déchargement des déchets toxiques, il a été effectué par la compagnie locale Tommy.
ARRESTATION DE SEPT PERSONNES
Paul Bouhoun Bouabré, ministre du Plan, a affirmé lundi que la Côte d'Ivoire "utiliserait tous les textes internationaux disponibles" pour obtenir justice et réparation. "Nous n'avons pas l'intention d'être la poubelle du monde", a-t-il souligné. Il faisait notamment référence à la convention de Bâle, signée en 1989, qui pose le principe que chaque pays est responsable de la gestion de ses propres déchets et conditionne leur exportation à l'accord préalable de l'Etat destinataire.
M. Bouabré a ajouté que "tous ceux qui sont responsables à divers niveaux vont subir les conséquences de leurs actes au niveau national comme international". Il a d'ailleurs confirmé l'arrestation de sept personnes, dont trois dirigeants de sociétés travaillant au port d'Abidjan : Tommy, mais aussi Puma Energie et Waibs.
La situation est d'autant plus délicate pour les autorités ivoiriennes que jeudi, le premier ministre, Charles Konan Banny, a présenté la démission de son gouvernement, coupable selon lui de "négligences" dans cette affaire "grave", et qu'une nouvelle équipe gouvernementale n'a pas encore été composée.
Un trafic très juteux qui se mondialise
LE MONDE 13.09.06 13h50 • Mis à jour le 13.09.06 13h50

L'affaire du Probo Koala n'est pas isolée. "Quatre ou cinq cas comparables, soit de déversements, soit de tentatives, nous sont rapportés chaque année", affirme Pierre Portas au secrétariat de la convention de Bâle, l'instrument de régulation des exportations de déchets dangereux. Les flux mondiaux sont difficiles à quantifier : d'une part, les pays répugnent à déclarer leur production, d'autre part, le trafic est souvent illicite.

Selon les données partielles collectées par le Programme des Nations unies pour l'environnement (PNUE), la quantité de déchets dangereux produits s'élevait à 108 millions de tonnes en 2001. Et la quantité de déchets exportés est passée de 2 millions de tonnes en 1993 à 8,5 millions de tonnes en 2001. "Mais nous n'avons aucune idée du trafic illicite effectué par le crime organisé. Ce qu'il rapporte se chiffre en milliards de dollars", relève M. Portas. L'Afrique et les anciennes républiques soviétiques, dont les réglementations sont laxistes, servent le plus souvent de réceptacles aux substances dangereuses issues des industries (arsenic, mercure, plomb, fluor, amiante, solvants, etc.).

La ratification de la convention de Bâle qui faisait suite à plusieurs scandales - dont le plus emblématique fut l'épandage de déchets à Koko Beach au Nigéria, en 1987 - n'a pas suffi à endiguer ce phénomène. "Depuis une dizaine d'années, la mondialisation des échanges de marchandises a également entraîné une mondialisation du trafic de déchets dangereux", explique M. Portas. Il emprunte tous les moyens de transport : camions, trains, avions, mais surtout navires. La fluidité du trafic, la dilution des responsabilités grâce aux pavillons de complaisance et le manque de contrôle dans les ports permettent de s'affranchir de la réglementation.

"Au Havre ou à Amsterdam, des milliers de containers transitent chaque jour, il est impossible de tout contrôler, nous sommes dépassés par les événements", déplore M. Portas, qui plaide pour un meilleur contrôle des déplacements des navires, et une traçabilité des cargaisons.
Gaëlle Dupont
Article paru dans l'édition du 14.09.06

LE MONDE 13.09.06 13h50 • Mis à jour le 13.09.06 16h01


Les déchets toxiques répandus fin août à Abidjan (Côte d'Ivoire), et qui ont déjà fait six morts et des milliers d'intoxiqués, ont été déchargés d'un navire en provenance d'Europe, le Probo Koala. La justice ivoirienne tente aujourd'hui de démêler les responsabilités dans cette affaire. Sept personnes ont été arrêtées, dont trois responsables d'entreprises travaillant sur le port d'Abidjan. L'une d'entre elles est la société de traitement de déchets Puma Energy, filiale de l'entreprise Trafigura, celle-là même qui a affrété le Probo Koala. Un dirigeant de la société Waibs, et un dirigeant de la société Tommy, qui a procédé à l'épandage, ont également été arrêtés.


La convention de Bâle, ratifiée en 1992, vise à réduire les quantités de déchets dangereux produites, à les traiter au plus près de leur lieu de production, et à limiter les mouvements transfrontaliers. S'il veut exporter, le producteur du déchet doit solliciter l'autorisation du pays concerné, vérifier que les déchets peuvent être traités sur place "d'une façon écologiquement rationnelle", et informer les Etats de transit. Cette convention ne concerne pas les déchets dus à l'exploitation des navires.
La convention Marpol sur la prévention des pollutions maritimes (1978) interdit aux navires de se débarrasser de leurs déchets en mer, et oblige à les traiter dans des installations adéquates, dont les ports doivent s'équiper.


Plus de 15 000 consultations et six décès

"Le cumul de toutes les consultations jusqu'à hier soir [mardi] s'élève à 15 749", a déclaré, mercredi 13 septembre, le ministère de la santé ivoirien. "Parmi ces personnes, nous avons 23 hospitalisations et six décès", a-t-il ajouté.
Mardi, les autorités ont précisé que le nombre des personnes intoxiquées devait être inférieur au nombre des consultations, plusieurs malades ayant pu consulter plusieurs fois. — (Avec AFP.)

Selon la justice ivoirienne, citée par l'Agence France Presse, le Probo Koala "a informé la société Puma Energy de son intention de se débarrasser de ses eaux usées". Celle-ci a alors pris contact avec un intermédiaire, la société Waibs, qui lui a conseillé de s'adresser à l'entreprise Tommy, agréée seulement depuis le 12 juillet. La multinationale Trafigura, l'un des principaux courtiers indépendants sur le marché du pétrole et des métaux, a, dans un premier temps, fourni peu d'explications. Aujourd'hui plus prolixe, elle réfute toute responsabilité dans l'affaire.
Selon elle, les déchets débarqués à Abidjan ne provenaient pas de la cargaison du navire (des produits pétroliers bruts) mais étaient des résidus issus du nettoyage des cuves du bateau. Il s'agirait de boues (slops) composées "d'essence, de soude caustique et d'eau" (des produits utilisés pour le nettoyage) et de restes d'hydrocarbures décapés par ce mélange. La convention internationale Marpol sur la prévention des pollutions maritimes interdit de se débarrasser en mer de ces déchets qui doivent régulièrement être vidangés, stockés et traités dans des installations adéquates.
Comment de banals résidus d'exploitation ont-ils pu produire de tels dégâts ? Les premières analyses en Côte d'Ivoire ont montré qu'ils contenaient des molécules très toxiques, dont de l'hydrogène sulfuré. En outre, le déchargement et le traitement de ces résidus, prévus à Amsterdam début juillet, n'ont pas eu lieu. La cargaison "puait terriblement", explique Theo Smit, directeur de la société de traitement des déchets Amsterdam Port Service (APS).
"L'analyse des produits a montré la présence de composés inhabituels, il fallait en conséquence les stocker et les transporter à Rotterdam, ce qui nous aurait coûté beaucoup trop cher : 35 000 dollars par jour d'immobilisation 250 000 dollars de pénalités de retard", explique Jan Maat, porte-parole de Trafigura. Le navire a donc poursuivi sa route vers l'Estonie, afin d'y prendre livraison de produits pétroliers. Les services néerlandais chargés de l'inspection des navires ont laissé partir le tanker car il n'avait pas, selon eux, besoin d'une licence d'exportation : les eaux de rinçage des navires, considérées comme des déchets maritimes, ne sont pas soumises aux restrictions d'exportation des déchets dangereux édictées par la convention de Bâle.
"DIX OU QUINZE FOIS PLUS CHER"
Le Probo Koala s'est alors dirigé vers l'Afrique de l'Ouest "sans effectuer aucune escale", selon l'entreprise. La cargaison a d'abord été livrée au Nigeria, puis les résidus d'exploitation ont été vidangés à Abidjan, "l'un des ports les mieux équipés d'Afrique de l'Ouest", affirme M. Maat. Selon Jim Puckett, coordinateur du Basel Action Network (BAN), qui lutte contre le trafic de déchets dangereux, "cette multinationale ne peut être naïve au point de croire que la Côte d'Ivoire dispose des moyens de traitement nécessaires". Les défenseurs de l'environnement soupçonnent une volonté délibérée d'échapper aux règles qui contrôlent le transfert de déchets dangereux vers les pays pauvres.
L'association Robin des Bois évoque "un brigandage qui a permis d'économiser beaucoup d'argent par rapport à un traitement dans un pays européen, qui aurait coûté dix ou quinze fois plus cher". "L'hypothèse selon laquelle des déchets liquides ou pâteux auraient pu être amalgamés aux résidus de cargaison afin d'échapper à la Convention de Bâle ne peut pas, dit-elle, être exclue." Si des déchets dangereux ont été délibérément chargés en Europe, les gestionnaires du navire seront responsables, mais aussi le pays qui a laissé partir le tanker. La réglementation européenne interdit en effet l'exportation de tels résidus.
Gaëlle Dupont et Jean-Pierre Stroobants (à Bruxelles)
Article paru dans l'édition du 14.09.06

Gaëlle Dupont et Jean-Pierre Stroobants (à Bruxelles)